LES ENTREPRENEURS DOUTENT DE L'EQUITE DES CONSEILS DE PRUD'HOMMES

Publié le par ADE 92

L’idée était séduisante, voire intelligente, de créer une juridiction pour connaître des litiges relatifs aux contentieux pouvant naître du contrat de travail, composée exclusivement de gens issus du monde du travail, à savoir employeurs d’un côté et salariés de l’autre.

Cependant, force est de constater, que l’incohérence juridique d’une grande partie des décisions rendues par cette juridiction donne aujourd’hui l’impression à certains de ses justiciables, en particulier les employeurs, que l’impartialité exigée devant toute juridiction n’était pas/plus de mise devant le Conseil de Prud’hommes.

Ils ont donc considéré, à tort ou à raison, que cette juridiction a évolué à travers les siècles d’une manière partisane, ce qui a eu pour conséquences une remise en cause par ces derniers de la raison d’être même de cette juridiction. Ce sentiment est aujourd’hui regrettable, d’autant plus lorsque que cette institution remonte à fort longtemps.

En effet, on voit apparaître dès la fin du XIIIème siècle (dans les années 1290) déjà le vocable : « Conseil de Prud’hommes ». A cette époque, si cette juridiction ne connaissait ni la forme, ni la spécialisation qu’elle a aujourd’hui, elle traitait déjà des contentieux spécialisés (professionnels), notamment des litiges pouvant intervenir entre les fabricants et les marchands qui fréquentaient les foires.

Par la suite, d’autres formes de conseils de prud’hommes du même genre vont apparaître, notamment dans les villes maritimes, là encore pour régler des litiges très spécifiques entre pêcheurs et marins.

Mais, c’est la loi de 1806 qui va créer le Conseil de Prud’hommes tel que nous le connaissons aujourd’hui, en instituant la première de ces juridictions à Lyon. A l’époque, la composition de cette juridiction était majoritairement, voire essentiellement employeurs. Ce n’est qu’en 1848, que va apparaître l’institution d’une composition paritaire avec cependant, pour le président, une voix prépondérante. Ainsi, durant tout le XIXème Siècle, cette institution va s’implanter et se développer dans le cadre juridique français.

A l’époque, il est important de souligner que 90 % des litiges se réglaient dans le cadre de la conciliation !!  En 1905, une nouvelle réforme va intervenir, supprimant la voix prépondérante du président. En 1907, le Conseil de Prud’hommes devient une véritable juridiction sociale pour connaître tous les litiges individuels relatifs au contrat de travail. La loi de 1979, appelée « loi Boulin », va généraliser cette institution tant sur le plan géographique que dans différentes branches d’activités.

Aujourd’hui, le Conseil - composé paritairement de deux membres représentant les salariés et de deux membres représentant les employeurs - comprend cinq secteurs d’activités différents : -

- activités diverses,

- agriculture,

- commerce et services commerciaux,

- encadrement,

- industrie.

 

En 2008, il existait environ 300 conseils de prud’hommes en France (271). Cependant, la réforme de la carte judiciaire va en supprimer une soixantaine. Tout avait donc été préparé, calculé, pour que cette juridiction fonctionne à merveille et ne fasse l’objet du moindre soupçon, puisque les salariés et les employeurs étaient jugés par leurs pairs. Cela avait d’ailleurs très bien commencé.

En effet, non seulement la composition était dans la forme juste et équitable, mais la division en secteurs d’activités, afin de faire juger les justiciables par des personnes spécialisées dans leur secteur, connaissant par voie de conséquence les aléas et les particularités de la branche d’activité, était, là encore, une garantie supplémentaire de justice impartiale.

Si à la fin du XIXème Siècle, la quasi-totalité des affaires se réglait dans le cadre la conciliation, force est de constater que, de nos jours, les tendances se sont catégoriquement inversées. En effet, seule une minorité de cas se règle lors de la conciliation. Les parties préfèrent dans la grande majorité des cas, lorsqu’elles doivent trouver un accord, le trouver en dehors de cette juridiction.

Par ailleurs, une grande majorité d’affaires qui sont plaidées devant le bureau de jugement, se retrouvent devant la Cour d’Appel, ce qui démontre que, non seulement les litiges ne se règlent plus aujourd’hui en conciliation, mais ne se règlent pas davantage devant le bureau de jugement du Conseil de Prud’hommes.

L’on peut alors s’interroger sur les raisons de ce changement.

La modernisation et la judiciarisation de notre système ne sauraient tout expliquer. En effet, on peut s’interroger sur les raisons pour lesquelles toute une partie des justiciables relevant de cette juridiction, et plus particulièrement les employeurs, sont prêts à tout aujourd’hui pour ne pas avoir à y déférer.

Ce sentiment, bien que regrettable, est malheureusement présent et réel. Il faut reconnaître à leur décharge que les conditions dans lesquelles certaines audiences se déroulent depuis l’introduction de la procédure jusqu’au terme de ces dernières, justifient la crainte et la hantise de l’employeur.

Nous allons donc essayer d’expliquer les principales raisons qui ont fait à nos yeux du Conseil de Prud’hommes aujourd’hui « la bête noire » des employeurs.

L’image de victime véhiculée par le salarié.

Depuis toujours, le salarié a été considéré comme la partie juridiquement et économiquement la plus faible. De ce fait, il était donc normal que ce dernier bénéficie devant la juridiction prud’homale d’une écoute et d’une attention particulières.

Cependant, si cette différence de traitement a pu se justifier par le passé, il n’en est plus de même aujourd’hui. En effet, l’évolution du Code du Travail, avec nombre de mesures protectrices en faveur du salarié, le développement de la jurisprudence imposant des obligations croissantes à la charge de l’employeur pour veiller notamment à la santé et la sécurité des salariés, la mise en place d’un certain nombre d’institutions : inspection du travail... ont rétabli largement le déséquilibre qui pouvait exister par le passé.

 

De plus, le développement de l’aide juridictionnelle, la possibilité pour le salarié de se faire assister par des salariés initiés, donc formés juridiquement, ont aussi contribué à rétablir cet équilibre.

Dès lors, l’adage « pot de fer contre pot de terre » n’est plus vraiment tout à fait d’actualité de nos jours. Il n’y a donc plus aucune raison à ce que les salariés puissent véhiculer encore cette image de la partie la plus faible ou de victime « a priori », même lorsqu’il se présente devant le Conseil de Prud’hommes après avoir fait l’objet d’un licenciement.

En effet, il convient de rappeler, tout d’abord, que plus aucun salarié ne se permet d’adresser un simple courrier à son employeur, sans être assisté, conseillé, par un avocat ou un salarié initié, à savoir ayant reçu une formation juridique.

Dans bien souvent des cas, le salarié connait la législation sociale aussi bien que son employeur, voire quelques fois plus, lorsqu’il s’agit de petites et moyennes entreprises, dans lesquelles l’employeur passe plus de temps à essayer de faire survivre son entreprise, qu’à étudier les dispositions du Code du Travail.

Nous pouvons citer ainsi l’exemple d’un salarié qui ne souhaite plus travailler et qui propose à son employeur de cesser la relation contractuelle par le biais d’une rupture conventionnelle et ce, afin de pouvoir bénéficier des allocations chômage.

Si l’employeur refuse par impossibilité matérielle ou financière, et que le salarié connait bien les rouages du système, il peut obliger l’employeur à le licencier tout de même. En effet, il suffit pour ce dernier de ne plus se présenter à son poste.

La législation sociale oblige effectivement l’employeur à prendre l’initiative de la rupture, dans pareille hypothèse. De ce fait, le salarié aura obtenu non seulement la rupture de son contrat de travail, mais aussi la possibilité de percevoir les indemnités de chômage.

Force est de constater que, dans cette hypothèse, c’est le salarié, lui-même, qui a provoqué son licenciement. Cependant, s’il décidait, à la suite de ce licenciement, de se présenter devant le Conseil de Prud’hommes pour contester ce dernier, il peut encore bénéficier de cette image de « victime » a priori, ce qui est surréaliste !

Cependant, cette image de partie la plus faible ne s’arrête souvent pas à la saisine même du Conseil de Prud’hommes. Elle se poursuit quelques fois, voire souvent, pendant tout le déroulement de la procédure elle-même. C’est ainsi, par exemple, que les conseillers prud’homaux pardonneront plus facilement le non-respect du principe du contradictoire (d’oublier de communiquer une pièce à son adversaire ou la communiquer tardivement) à un salarié qu’à un employeur et ce, même si le salarié est assisté d’un avocat !

Là encore, cette partialité est inacceptable.

Quelques fois, il arrive même que les conseillers soulèvent d’office, au cours de l’audience, une question qui n’a jamais été évoquée par le demandeur et ce, alors même que le Code du Travail ne permet pas au conseiller prud’homal de le faire. Dans ces conditions, l’employeur se doit non seulement de faire face au demandeur, mais aussi au conseiller lui-même. Si une telle partialité pouvait à la rigueur se comprendre lorsque le salarié se défend seul, elle n’est pas compréhensible lorsque le salarié est assisté d’un avocat.

De même, l’employeur est tout aussi surpris, voire choqué, lorsque les conseillers montrent ostensiblement leur position, quelques fois avant même la fin de l’audience de plaidoirie.

Nous pouvons citer ainsi l’exemple d’un président d’un bureau de conciliation qui avait conseillé à l’employeur de ne pas se représenter devant lui en bureau de jugement, en lui indiquant qu’il avait tout intérêt à concilier dans ce dossier !

Cette prise de position est non seulement incompréhensible et abusive, mais n’est pas de nature à redorer l’image de cette juridiction aux yeux de l’employeur. En effet, nous n’avons jamais vu un président d’un bureau de conciliation intimer à un salarié de ne pas se présenter à l’audience de bureau de jugement !

Ces prises de position, ces impressions données officiellement, nuisent à la sérénité des débats et font perdre toute crédibilité à cette juridiction aux yeux d’une partie de ses justiciables. Une majorité d’employeurs estime que, non seulement ils ne sont pas entendus devant cette juridiction, mais ne sont même pas écoutés. Ils considèrent que, bien souvent, les conseillers ont d’ores et déjà pris leur décision avant même de les avoir entendus ! Malheureusement, cette étiquette de victime - a priori - n’est pas la seule raison qui fait craindre le Conseil de Prud’hommes aux employeurs. En effet, une certaine indulgence, voire laxisme, dans le traitement des actions abusives contribue aussi à renforcer ce sentiment d’injustice.

La non sanction des actions abusives

Force est de constater que la majorité des employeurs considèrent que le fait d’être cité aujourd’hui devant un Conseil de Prud’hommes est déjà pour eux synonyme de « défaite». En effet, une grande majorité d’entre eux considère qu’ils ne gagnent jamais devant le Conseil de Prud’hommes.

Ils l’expliquent par les raisons suivantes :

- soit le salarié est débouté de l’ensemble de ses demandes (c’est l’hypothèse la plus  favorable). Cependant, dans la mesure où le salarié n’est même pas condamné à un article 700 du Code de Procédure Civile (remboursement d’une partie de leurs frais d’avocat), ni à une indemnité en présence d’une action abusive, l’employeur considère que, même dans ce cas de figure, il a perdu. En effet, l’employeur aura supporté pendant plus d’un an des frais d’avocat pour se défendre contre une action en tous points abusive, sans pouvoir espérer recouvrer le moindre centime d’euros. De son côté, le salarié, dans une telle hypothèse, sera simplement débouté.

- soit l’employeur est condamné à verser un certain nombre d’indemnités au salarié. Dans cette situation, la position de l’employeur est naturellement la pire puisque - au-delà des condamnations qu’il devra supporter - il supportera, au surplus, les frais d’avocat ou une partie des frais d’avocat du salarié, outre les frais qu’il a dû débourser pour son propre avocat.

Nous pouvons constater que, sous cet angle là, la crainte de l’employeur est légitime.En effet, dans l’esprit du salarié, de nos jours, aller devant le Conseil de Prud’hommes revient pour lui à avoir un résultat toujours supérieur ou égal à zéro. Le négatif n’existant pas.

Cette situation d’injustice est vécue difficilement par les employeurs et ce, à tous les stades de la procédure. Nous pouvons citer comme exemple, les dispositions de l’article 9 du Code de Procédure Civile qui disposent qu’il appartient au demandeur, dans le cadre d’une procédure judiciaire, de rapporter la preuve de ses allégations.

En matière de contentieux de licenciement, il a été précisé que l’administration de la preuve pouvait incomber à chacune des parties. Là encore, les dispositions du Code Travail ont tempéré celles du Code de Procédure Civile et ce, toujours en raison de ce déséquilibre qui existerait entre les parties. Cependant, lorsque le salarié introduit une demande et ne rapporte pas la preuve - ni même le moindre commencement de preuve - à l’encontre de son employeur, il y a lieu dans ces conditions non seulement de le débouter, mais de le sanctionner aussi, ne serait-ce que dans le principe, afin de dissuader ce dernier de recommencer ce type de procédé.

Le fait de ne pas le sanctionner pour action abusive, non seulement l’incite à recommencer, mais dégrade un peu plus l’image de cette juridiction aux yeux de l’employeur. Cet exemple n’est malheureusement un cas isolé.

Nous pouvons citer encore comme autres illustrations le motif le plus usité aujourd’hui devant le Conseil de Prud’hommes, à savoir : le harcèlement moral.

C’est un concept à la mode, et beaucoup de demandes ont comme fondement aujourd’hui le harcèlement moral. Naturellement, pour le cas où ces cas de harcèlement moral sont avérés et la preuve rapportée, l’employeur doit être condamné. Il ne s’agit pas ici de demander de faire passer la balance d’un côté à l’autre sans aucun fondement. Cependant, lorsque le salarié, non seulement n’est pas capable de rapporter la preuve de ce qu’il avance, mais se fonde sur ce motif uniquement pour masquer ses propres carences, le Conseil de Prud’hommes ne doit pas se laisser duper par ces procédés et doit faire preuve de fermeté. Il en est ainsi, par exemple, du cas du salarié qui est licencié pour non-respect de ses obligations contractuelles. Ce dernier va saisir le Conseil de Prud’hommes afin de contester son licenciement. Pour fonder ses demandes, il invoquera le fait d’avoir été harcelé, raison pour laquelle il n’a pu exécuter correctement ses obligations contractuelles. Dans cette hypothèse, et pour le cas où le salarié n’arriverait pas à démontrer le prétendu harcèlement moral et que l’employeur arriverait - lui - à démontrer les fautes réelles commises par le salarié, ce dernier, devrait non seulement être débouté de sa demande, mais au surplus condamné à rembourser à l’employeur une partie de ses frais d’avocat, voire à des dommages et intérêts pour procédure abusive. Or, il n’en est rien !

Dans une grande majorité des cas le salarié est purement et simplement débouté, l’employeur conserve- lui - à sa charge les frais d’avocat déboursés pour se défendre. La formule consacrée, dans ce cas de figure, est qu’il n’est pas équitable de laisser à la charge de l’employeur les frais déboursés pour se défendre. Cette formule est d’autant plus inacceptable - voire choquante - lorsque nous nous trouvons dans un cas où le salarié sollicite et obtient la condamnation de l’employeur pour licenciement abusif. Dans cette hypothèse, il se peut quelques fois que ce salarié se soit présenté seul pour se défendre.

Or, au-delà de la condamnation qu’il va obtenir du Conseil de Prud’hommes pour ses différents chefs de demandes, il obtiendra - en plus - une somme au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile, alors qu’il n’était pas assisté d’un avocat !! Si l’on se réfère aux textes, cette somme est sensée couvrir des dépenses que le justiciable aurait eues à débourser pour faire valoir ses droits en justice. Or, 1.500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile pour un salarié qui s’est défendu seul est souvent vécu par l’employeur comme un « cadeau » attribué au salarié. En effet, si les conseillers prud’homaux devaient motiver l’allocation d’une telle somme, ils seraient bien « embêtés », sauf à démontrer que c’était le prix du déplacement de ce dernier de son domicile au Conseil de Prud’hommes... par avion.

Nous pouvons aussi faire allusion, dans le même ordre d’idée, à un chef de demandes très répandu de nos jours devant le Conseil de Prud’hommes, soit : les heures supplémentaires.

En effet, 90 % des demandes pendantes devant le Conseil de Prud’hommes contiennent un poste relatif aux heures supplémentaires ! Cela signifie qu’à chaque fois qu’un salarié est licencié pour motif personnel ou un motif économique, ce dernier, en contestant son licenciement, se souvient subitement que, pendant les cinq dernières années (prescription quinquennale oblige), il a effectué des heures supplémentaires qu’il a omis de revendiquer et en formule donc la demande au Conseil de Prud’hommes.

Là encore, dans bien des cas, ces demandes ne sont pas fondées. Si tel avait été le cas, le salarié les aurait revendiquées bien avant. Une fois de plus, pour le cas où ces demandes sont fondées, il est légitime que la condamnation soit prononcée. Cependant, pour le cas où cette demande serait abusive, là encore, le salarié ne risque rien d’autre qu’un simple débouté. De ce fait, de nombreuses entreprises, et plus particulièrement de petites entreprises, sont asphyxiées par de telles demandes abusives.

La menace du Conseil de Prud’hommes est devenue une arme redoutable pour les salariés. Des salariés savent pertinemment qu’ils n’ont rien à perdre à saisir le Conseil de Prud’hommes, même si leur action est en tous points abusifs.

Il est donc étonnant - voire choquant - que des conseillers prud’homaux, issus du monde du travail, ne puissent pas se rendre compte de tels abus et ne les sanctionnent pas, afin de dissuader les demandeurs de mauvaise foi.

Le dernier exemple de cette liste n’est malheureusement pas limitatif, mais caractérise une fois de plus, si besoin est, le degré d’indulgence dont font preuve les conseillers à l’égard des salariés et ce, au grand désespoir des employeurs.

En effet, beaucoup d’employeurs se sont vus confrontés à un cas de licenciement qui se règle - pour une raison ou pour une autre - par le biais d’un protocole transactionnel. La plupart du temps, lorsque l’employeur est assisté d’un avocat, ce dernier demande au salarié de se faire - lui aussi - assister par un avocat, afin que l’accord signé soit dénué de toute ambigüité, que chaque terme soit bien compris par le salarié.

Or, dans bien souvent des cas, le salarié se refuse à prendre un avocat, afin d’éviter d’avoir à supporter des honoraires qu’il devrait déduire de son indemnité transactionnelle. Cependant, une fois le protocole d’accord régularisé, signé, le chèque payé et encaissé, certains salariés ne se gênent pas pour remettre en cause l’accord par la suite, en tentant d’obtenir, au-delà de la somme qu’ils ont perçue, des indemnités supplémentaires devant le Conseil de Prud’hommes.

Les conseillers prud’homaux devraient, dans ce cas de figure, et dans la mesure où ils estiment recevable ce type d’action (ce qui est déjà contestable), faire preuve d’une très grande fermeté lorsqu’il est démontré que la demande du salarié est abusive. Or, là encore, dans bien souvent des cas, le salarié n’est que débouté.

En conséquence, force est de constater que, si une grande majorité d’employeurs ont une image négative du Conseil de Prud’hommes, alors que cette juridiction devrait rassurer et donner des garanties nécessaires à l’ensemble de ses justiciables, c’est uniquement parce que - dans les faits - certains usages et pratiques remontent à une époque aujourd’hui révolue. En conclusion, il n’est pas contestable, ni contesté, que le Conseil de Prud’hommes souffre d’un déficit de sympathie et de crédibilité de la part des employeurs. Ce sentiment est malheureusement souvent justifié pour les raisons qui ont été ci-dessus développées.

Beaucoup d’auteurs ont tenté de comprendre les raisons d’une telle partialité, alors que - dans les faits aujourd’hui - le déséquilibre qui a pu exister à un moment donné a disparu. Cependant, certains conseillers préfèrent continuer, pour des raisons idéologiques, à faire droit à des demandes abusives, plutôt que de débouter le salarié de mauvaise foi. Cette volonté de surprotéger des « victimes » qui n’en sont pas - ou plus réellement - n’a pour seule conséquence que de pénaliser les vraies victimes. En effet, le fait de ne pas sanctionner les actions abusives incite les demandeurs de mauvaise foi à renouveler leur comportement à une ou plusieurs reprises.

Dès lors, les rôles de ces juridictions sont encombrés. De ce fait, le salarié « véritablement victime » doit lui attendre des mois et, quelques fois des années, avant de faire valoir ses droits. De plus, cette partialité apparente crée un sentiment de crainte justifié pour l’employeur et le dissuade dans bon nombre de cas à régulariser un contrat de travail à durée indéterminée.

En effet, dans le doute, ce dernier va s’abstenir.

Là encore, les « victimes » de ce comportement sont les salariés. Par ailleurs, de par cette même crainte, même lorsque l’employeur n’a pas le choix et doit embaucher, il préférerait avoir à faire à des prestataires extérieurs que de créer une relation salariale basée sur un CDI.

Dès lors, il relève de l’évidence même certaines pratiques - et ou décisions - rendues par certains conseils de prud’hommes sont, contrairement aux idées reçues préjudiciables aux salariés eux-mêmes. La partialité affichée par certains, non seulement nuit gravement à l’image de cette juridiction, mais profite surtout - et d’abord – aux demandeurs de mauvaise foi. C’est la raison pour laquelle, ce sentiment de partialité ressenti dans bien des hypothèses, à juste titre, doit être combattu.

Il nous appartient, en conséquence, à nous, avocats, de nous battre systématiquement avec force, contre ces idées reçues, ces dérives et ces abus. Nous nous devons de rétablir cet équilibre indispensable à toute justice, à chaque fois que les principes fondateurs de notre justice sont bafoués.

Nous ne devons, en aucune manière, céder à la lâcheté, mais réagir avec conviction, afin de restaurer à notre petite mesure, une impartialité sans laquelle il n’y a pas de justice. Il en va de notre mission, de notre devoir, et avant tout de notre dignité d’avocat.

 

Georgy ARAYO

Avocat au Barreau de Paris

Cabinet A & M Partners

arayo@arayomontini.com

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